Les saints sauroctones

Nombre de régions françaises possèdent un saint qui jadis les débarrassa, en la domptant, en la soumettant ou en la tuant d’une bête malfaisante,  dragon aux noms divers et variés.

Le sauroctone est un « tueur de sauriens » : du grec « saûros -σαῦρος ,» = lézard, saurien et « któnos-κτόνος » = tueur.  

Il s'agit d'un des grands thèmes de la mythologie universelle.

Apollon à qui on a emprunté l’épithète de « sauroctone » en est un des prototypes.
Il tua Python, un serpent monstrueux, fils de Gaïa (la Terre). De ce fait il supplanta les forces obscures du monde souterrain et fit triompher la lumière.



Un des travaux d’Hercule consista à tuer l'Hydre de Lerne aux multiples têtes.


En Egypte, le dieu du soleil Râ luttait toutes les nuits dans le monde des ténèbres, contre le dieu serpent maléfique Apophis qui était vaincu à chaque  lever du soleil.


En Inde, Krishna vainquit Kaaliya un  serpent venimeux vivant dans un fleuve.



Dans la légende des quatre fils Aymon, Maugis l’enchanteur, tua un  dragon et s’empara du cheval-fée  Bayart.


Les hagiographies n'ont fait que reprendre les anciennes traditions païennes qui survivent ainsi à travers elles.  

Succédant aux druides de l'ancienne Gaule, ces saints  libéraient les contrées de bêtes qui personnifiaient les énergies terribles (sens premier : qui frappaient de terreur) de la terre. Symbole de la lutte du bien contre le mal, de la lumière contre les ténèbres, de l'esprit contre la matière.  

Certains thèmes se retrouvent régulièrement associés aux récits des « sauroctones » :

- le dragon habite dans des zones marécageuses.  
- le dragon trouve refuge dans un souterrain.
- le dragon est soumis par une étole ou une écharpe.  
- le saint est souvent secondé par un condamné qui gagne ainsi à ses côtés son salut.  
- les dragons ne sont pas tués mais enchaînés et renvoyés dans leur antre avec interdiction d’en sortir, comme si il ne fallait pas rompre l’équilibre des forces souterraines.

Parmi les explications scientifiques, on pense  en voyant certaines gravures que des animaux de la famille des « crocodiles » ou des serpents de grande taille furent  tués.

Saint Armel débarrassa la forêt du Teil (Ille-et-Vilaine) d'un dragon appelé « la Guivre ». Il l’aspergea d’eau bénite, l’entoura de son étole, et lui ordonna de se jeter dans la Seiche.                     

 

Le nom de « guivre » est une déformation de « vouivre » créature fantastique mythologique. Elle a la  forme d'un dragon ou d'un serpent, selon les légendes régionales.
Du latin « vipera= vipère » devenu en haut- allemand  « Wyvern ». 
Le W germanique difficile à prononcer pour les peuples latins a été remplacé par GW, puis par G.
Ce qui explique que Wouivre soit devenu Guivre.